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Le Conseil d’État prononce l’extinction des tarifs réglementés du gaz naturel

Public - Droit public des affaires
20/07/2017
La décision du 19 juillet 2017 des juges du Palais - Royal marque a priori l’épilogue de l’offensive lancée par l’Association nationale des opérateurs détaillants en énergie contre les tarifs réglementés du gaz naturel. Nonobstant la marge de manœuvre concédée à la France par la Cour de justice en septembre 2016, le maintien de tels tarifs a été jugé contraire au droit de l’Union européenne.
La Haute juridiction européenne avait en effet été amenée à se prononcer sur la compatibilité du dispositif français à l’objectif de réalisation d’un marché du gaz naturel concurrentiel consacré par la directive n° 2009/73 du 13 juillet 2009. Rappelons que les articles L. 445-1 à L. 445-4 du code de l’énergie imposent à l’opérateur historique de gaz naturel, GDF-Suez, ainsi qu’à des entreprises locales de distribution et à Total Énergie Gaz de proposer le gaz naturel à des tarifs réglementés (c’est-à-dire maximaux) pour certaines catégories de consommateurs finaux (essentiellement des ménages et des petites et moyennes entreprises). La Cour de justice de l’Union européenne a alors reconnu en faveur de la France le 7 septembre 2016 que la sécurité de l’approvisionnement et la cohésion territoriale sont des objectifs d’intérêt général qui peuvent fonder une intervention étatique ponctuelle sur la fixation du prix de fourniture du gaz naturel (CJUE, 7 sept. 2016, aff. C-121/15, Association nationale des opérateurs détaillants en énergie, EU:C:2016:637, v. actualité du 14 sept. 2016).

Un pas de plus vers un marché concurrentiel du gaz

Et c’est à l’aune de cette solution que le Conseil d’État a décidé d’annuler le décret n° 2013-400 du 16 mai 2013 relatif aux tarifs réglementés de vente de gaz naturel, estimant qu’à la date dudit texte, les trois conditions posées par la CJUE pour que l’entrave à la réalisation d’un marché concurrentiel puisse être admise n’étaient plus satisfaites. Il s’agit en l’occurrence des critères consacrés en 2010 par la jurisprudence Federutility (CJUE, 20 avr. 2010, aff. C-265/08, EU:C:2010:205) indiquant que l’intervention :
  • doit poursuivre un intérêt économique général, c'est-à-dire avoir pour objet de garantir la sécurité des approvisionnements, la cohésion territoriale ou le maintien des prix à un niveau raisonnable ;
  • elle doit être proportionnée ;
  • elle doit prévoir des obligations de service public (OSP) clairement définies, transparentes, non discriminatoires et contrôlables tout en garantissant un égal accès des entreprises de gaz de l’Union aux consommateurs.
Une annulation modulée dans le temps

L’annulation s’avère en tout état de cause d’une portée essentiellement symbolique puisque la Haute juridiction administrative, tenant compte des observations formulées par les acteurs du secteur au cours de l’instance, a prévu que les effets produits pour le passé par le décret attaqué soient cristallisés, eu égard aux conséquences graves qu’une annulation rétroactive ferait naître sur la situation contractuelle des 9 millions de consommateurs concernés. Le Conseil d’État émet néanmoins une réserve quant aux actions contentieuses déjà engagées. Enfin, les dispositions litigieuses ayant été abrogées par un décret du 30 décembre 2015, le juge administratif s’est dispensé de se prononcer sur les effets à venir de sa décision.

Reste à savoir quel sera l'impact de la posture consacrée le 19 juillet dernier sur l'avenir des tarifs réglementés de l'électricité.
 
Source : Actualités du droit