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Accès aux soins dans les centres de rétention administrative

Public - Santé
05/04/2019
Dans le prolongement de l’avis du Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL), le ministère de l’Intérieur était interrogé sur le respect du droit fondamental à la santé et à l'accès aux soins des étrangers retenus en CRA.
Le 17 décembre 2018, le Contrôleur général des lieux de privation de liberté a délivré un avis relatif à la prise en charge sanitaire des personnes étrangères au sein des centres de rétention administrative (CGLPL, avis, 17 déc. 2018, NOR : CPLX1904878V, JO 21 févr.).
Face à l’allongement massif de la durée maximale du placement en rétention administrative, passée de 7 jours lors sa création (art. 7, L. n° 81-973, 29 oct. 1981, JO 30 oct.) à 90 jours depuis le 1er janvier 2019 (art. 29, L. n° 2018-778, 10 sept. 2018, JO 11 sept.), il est en effet apparu nécessaire à la CGLPL de revenir en détail sur les conditions de prise en charge sanitaire des personnes retenues et de réitérer ses recommandations en la matière. Était notamment rappelée, la nécessité « de veiller à ce que les considérations sécuritaires n’entravent pas le soin porté aux personnes et à ce que la lutte contre l’immigration irrégulière ne se fasse pas au détriment du droit à la protection de la santé ». Pour mémoire, la prise en charge sanitaire des étrangers retenus est actuellement régie par une circulaire du 7 décembre 1999 (Circ. min., 7 déc. 1999, NOR : MESN9930618C, inédite).

C’est dans le prolongement de cet avis que le ministère de l’Intérieur était interrogé, par voie de question écrite, sur les suites escomptées pour corriger les différents malfonctionnements constatés. Répondant plus en détail aux constats du GCLPL, la place Beauvau rappelle que les étrangers en situation irrégulière placés en centre de rétention administrative (CRA) bénéficient de garanties en matière d'évaluation des situations médicales et de suivi des soins.

D’abord, l’article L. 551-2 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) consacre l'obligation faites aux fonctionnaires de police d'informer l'étranger qu'il peut demander l'assistance d'un médecin. Et, dans le cadre de leurs missions, « les chefs de centre sont attentifs à permettre un accès facilité au service médical du CRA ».
Ensuite, conformément à l'article R. 553-3 du CESEDA, une ou plusieurs salles dotées d'équipements médicaux sont réservées au service médical, afin que les examens, actes médicaux et prescriptions puissent être délivrés aux retenus dans le respect du secret médical.

« Le ministère de l'Intérieur et les chefs de centre mettent tout en œuvre pour garantir la confidentialité des échanges médecin-patient, en tenant notamment compte des contraintes bâtimentaires. Des consignes très claires sont adressées aux personnels des centres pour qu'en toutes circonstances, ce secret puisse être préservé ».

Par ailleurs, le recours aux chambres de mise à l'écart fait l'objet d'un encadrement rigoureux par le ministère de l'Intérieur, qui signale à ses agents que cette mesure doit rester exceptionnelle.

En 2018, 729 placements en chambre d'isolement ont été effectués, sur un total de 20 489 étrangers placés en CRA (soit 3,5 % de placement).

Il est également rappelé que la décision de placement en chambre d'isolement appartient au seul chef de CRA ou, en son absence, à son adjoint. Elle peut être prise au regard du comportement du retenu, pour le protéger de lui-même (automutilation), en cas de risque de trouble à l'ordre public, ou s'il représente une menace à la sécurité des autres retenus. Elle peut également être prise pour un motif strictement sanitaire (par exemple une pathologie contagieuse). Un avis immédiat est en outre fait au procureur de la République localement compétent et le médecin du centre est informé. L'association présente dans le CRA est également informée dans les meilleurs délais. Ces mesures de placement, justifiées par des motifs légitimes, se font donc dans le respect des garanties des retenus, et sous le contrôle de l'autorité judiciaire et, le cas échéant, des équipes médicales.

En ce qui concerne l'augmentation de la durée de rétention, la place Beauvau indique que les chefs de centre ont demandé à ce que soient mises en place, des consultations de psychologues dans les centres de rétention administrative. Les services de la direction générale des étrangers en France ont donc demandé à la Direction centrale de la police aux frontières d'établir une expression des besoins, CRA par CRA, afin d'instaurer ces consultations hebdomadaires rapidement.

Ces éléments ont été transmis, en réponse, à la CGLPL, le 15 février 2019. La place Beauvau confirme enfin que le groupe de travail interministériel chargé de la rénovation de la circulaire de 1999 (précitée), mis en place en 2012, devrait rendre ses conclusions au cours du premier semestre 2019. Il s'agira d'expertiser les procédures juridiques nécessaires à la publication d'un nouveau texte, de réunir les professionnels de terrain et l'ensemble des acteurs institutionnels, ainsi que d'adapter la réglementation aux évolutions législatives récentes. Réforme à venir donc…
Source : Actualités du droit